Elle s’est aussi attaquée à la transformation-dépérissement de l’État, tout en prouvant et éprouvant que celle-ci dépend de l’avancée des autres points du programme communiste de Marx, autrement dit que la politique, non seulement n’est pas réductible aux questions de pouvoir et d’État, mais que les questions politiques – soit les questions du « contenu », orientation, mots d’ordre – sont prééminentes par rapport à l’État et déterminent le rapport à l’État. Ce faisant, elle a « nettoyé » les grands concepts du marxisme, depuis la notion de classe, qui fut l’enjeu de sévères discussions, de lutte de classes – pensée avant tout comme discussion au sein du peuple entre la voie capitaliste et la voie communiste, en termes d’enjeux et de mots d’ordre pratiques, ceci déterminant les questions d’affrontement et d’antagonisme, et non l’inverse –, et enfin le principal d’entre eux, celui que Marx considérait comme son apport propre, celui de dictature du prolétariat.
La Révolution culturelle a désétatisé la notion de dictature du prolétariat. Elle a mis fin une fois pour toutes (même si la marque de sa « provisoire » défaite se lit dans le retour au parti-État) à la notion d’« État de dictature du prolétariat ». Ce faisant elle a ouvert à la possibilité de sa mise en pratique, comme prise de pouvoir du peuple sur lui-même, quelle que soit son échelle, son lieu et sa durée, elle a donc ouvert à la possibilité de la politique communiste, aujourd’hui et à l’échelle du monde entier. Il y a deux voies, et pas une seule. Aux militants communistes, qui ne peuvent désormais tirer leur autorité que de leur propre décision et leur propre travail, de poursuivre et traiter ce faisant les questions en suspens.
Postface d’Alain Badiou
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